Le droit de rétractation des consommateurs et des usagers en Espagne

Le Texte Révisé de la Loi Générale pour la Défense des Consommateurs et des Usagers (ci-après TRLGDCU) prévoit une série de droits et obligations entre les entreprises et les clients et usagers. L´une des manifestations les plus claires de la protection que ce texte accorde aux consommateurs et aux usagers peut s´apprécier dans le droit de rétractation dont jouissent ces derniers. Ce droit de rétractation leur permet de mettre fin à un contrat passé avec l´entreprise sans avoir besoin de justifier leur décision et sans que l´exercice de ce droit ne génère de quelconques pénalités pour l´une des parties au contrat. L´objet de cet article est d´analyser les particularités et limitations générales de ce droit sans entrer dans les exceptions, ni les règles applicables aux secteurs particuliers.

 

Obligation d´information

 

Il convient en premier lieu de présenter en quoi consiste l´obligation d´information. L´article 60 paragraphe 2 point g du TRLGDCU impose, comme obligation préalable à la formation du contrat, à l´entreprise d´informer les consommateurs et usagers de l´existence de ce droit rétractation. Sur le fond, ladite information doit être véridique, adéquate et suffisante. Sur la forme, l´information doit être délivrée de façon claire, compréhensible et adaptée à la situation. De plus, l´article 69 du TRLGDCU dispose que le commerçant doit mentionner par écrit, à l´intérieur du document qui formalise le contrat, ce droit de rétractation, ses limites et ses exceptions. Ainsi, il est très important que l´information fournie par l´entreprise sur le droit de rétractation ne soit pas susceptible de provoquer une confusion entre ce droit et d’autres droits accordés spécifiquement au consommateur ou aux tiers. Le consommateur doit être informé de son droit de rétractation de façon individualisée.

 

Le délai du droit de rétractation

 

Le paragraphe 1er de l´article 71 du TRLGDCU impose un délai minimum de rétractation de 7 jours ouvrables. La précision de jours « ouvrables » exclut du délai de 7 jours les jours fériés et les week-ends. Le délai minimum est donc en réalité de 9 jours ou plus. Le point de départ du délai, à condition que l´entreprise ait accompli tous ses devoirs d’information mentionnés dans le paragraphe précédent, est fixé au moment de la réception par le client du bien qui fait l’objet du contrat ou, dans le cas des prestations de services, à compter de la formation du contrat.

On peut déduire de la rédaction de l´article 71 que l´entreprise a la faculté d´accorder aux clients ou usagers un délai supérieur aux 7 jours ouvrables légalement imposés. De tels délais peuvent résulter de politiques commerciales déterminées. Mais compte tenu de la rigidité du droit de rétractation, il est préférable pour l´entreprise d´accorder un droit de retour avec un délai plus long que celui du droit de rétractation. La coexistence de droit de rétractation avec un droit de retour oblige l´entreprise à distinguer clairement l´un et l´autre et à expliquer que le droit de retour ne remplace ni ne conditionne l´exercice du droit de rétractation légalement imposé.

 

L´exercice du droit de rétractation

 

Comme nous l´avons expliqué précédemment, l´article 69 du TRLGDCU oblige l´entreprise à mentionner par écrit dans le document contractuel, de façon claire, compréhensible et précise l´existence du droit de se rétracter du contrat, ses conditions et les conséquences de son exercice. L´entreprise doit également remettre au consommateur un document de rétractation. Ledit document doit être clairement identifié comme tel, et doit contenir le nom et l’adresse de la personne à qui il convient de l´envoyer, ainsi que les données permettant d´identifier le contrat et les parties à ce contrat. Il est à noter que l´adresse et le nom de la personne à qui envoyer le document de rétractation peuvent ne pas correspondre avec l´adresse et le nom, ou encore le siège social, de l´entreprise.

La remise de ce document de rétractation n´implique pas que l´exercice de ce droit soit sujet à de quelconques conditions de forme, puisque l´article 70 du TRLGDCU permet tous les moyens admis en droit, mais donne une importance particulière à l´envoi du document et au retour des produits reçus par le consommateur.

En outre, le commerçant doit garder à l´esprit que l´exercice du droit de rétractation ne peut pas être soumis à des exigences ou à des formalités excessives qui rendraient trop difficile son exercice. De même le contrat ne peut pas contenir de clauses pénales associées à l’exercice du droit de rétractation, puisque l`article 68 de TRLGDCU, dans son paragraphe 1er, frappe de nullité les clauses pénales qui affecteraient l´exercice du droit de rétractation.

Sont traitées distinctement les questions liées au coup de la rétractation. Il faut en principe se tourner vers l´article 79 du TRLGDCU, qui libère le consommateur et l´usager des quelconques coûts engendrés par la rétractation. Cependant, dans le cas des contrats à distance, l´article 101 du TRLGDCU permet à l’entreprise d´exiger du client qu´il prenne en charge les coûts liés à la restitution du bien ou des objets reçus dans le cadre d´une prestation de service.

 

Conséquences indirectes de l’exercice du droit de rétractation

 

Le paragraphe 1er de l´article 74 du TRLGDCU dispose que l´exercice du droit de rétractation génère des obligations réciproques entre le vendeur et l´acquéreur. D´un coté le consommateur ou usager devra rendre le produit, de l´autre le vendeur devra restituer les sommes d´argent reçues. Le même article ajoute dans les paragraphes suivants que le consommateur ou usager n´aura pas à rembourser une éventuelle baisse de la valeur du bien lorsque celle-ci sera due à un usage conforme au contrat, à la nature du bien ou à l´utilisation du service. De plus, le consommateur ou usager aura droit au remboursement des sommes qu’il aura investies dans le produit qu’il restitue.

Le remboursement du client doit comprendre la totalité des sommes reçues pour l achat, ce qui inclut le prix final du produit, avec tous les coûts additionnels tels que les frais de livraison. Les coûts ne peuvent pas être séparés les uns des autres, car l´obligation de restitution concerne tous les aspects. En outre, en vertu de l´article 76 du TRLCGDCU, le remboursement doit avoir lieu dans les 30 jours à compter de l´exercice du droit de rétractation. Le non-respect de ce délai autorisera le consommateur à exiger le double du montant.

Le remboursement est inévitable, mais peut avoir lieu sous une autre forme qu´un versement d´argent. L´entreprise ainsi que le consommateur ou usager peuvent convenir que le remboursement prendra la forme d´un crédit en faveur du client ou encore de bons d´achat. La loi n´interdit pas ce type de proposition, mais tout refus ou silence du consommateur entrainera un remboursement dans les 30 jours à compter de l´exercice du droit de rétractation.

 

Nicolás Melchior
Mariscal Abogados, Avocats francophones en Espagne

Eurojuris España, réseau espagnol inernational de cabinet d’avocats

 

 

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